Ce 15 août, la nuit est tombée dans le Donbass. Dmytro Melnyk fait démarrer sa voiture et met le haut-parleur sur son portable. Le commandant de peloton d’infanterie quitte ses positions de Tchassiv Yar, où l’armée ukrainienne mène depuis des mois un combat acharné contre les Russes. Alors qu’il arpente les petites routes de l’est de l’Ukraine, derrière, dans son sac kaki, tressaute un ballon de volley-ball, son ballon d’entraînement.
Avec un autre soldat, Yevgen Korinets, Dmytro Melnyk fait en effet partie des douze athlètes ukrainiens de volley assis qui s’apprêtent à concourir aux Jeux paralympiques de Paris. Parmi les cent quarante athlètes venus de Kiev, ils sont les deux seuls combattants de l’armée ukrainienne.
Il passe un checkpoint. L’ancien restaurateur de 45 ans a du mal à faire cohabiter ses deux univers. Il a été victime d’une chute à l’âge de 18 ans. Sa jambe gauche est de 8 centimètres plus courte que la droite. Il se lance alors dans la pratique du volley assis et, en 2008, il crée l’ONG Les Opportunités égalespour aider à l’insertion sociale des personnes handicapées. Avec la guerre du Donbass qui éclate en 2014, son travail prend une autre dimension :
« J’ai ce devoir de me surpasser »
A l’aube de l’invasion russe, en 2022, c’est son tour d’enfiler l’uniforme, estime Dmytro Melnyk. Mais il est refoulé à deux reprises au centre de recrutement de sa ville natale de Dnipro, à cause de son handicap. sourit le commandant. Ironie du sort, sa jambe gauche est touchée par l’explosion d’un obus russe, en août 2023. Il lui faut se relever, encore et encore.
A Paris, ses deuxièmes Jeux après ceux de Rio, en 2016, il pensera évidemment à ses en ukrainien) à sa femme et ses deux filles de 13 et 18 ans :
Dans son appartement du centre-ville de Jytomyr, à 850 kilomètres à l’ouest de Tchassiv Yar, Yevgen Korinets fait lui aussi, ce 15 août, ses valises pour Paris. Dans son armoire, parmi les tenues de sport bleu et jaune, le volleyeur de 27 ans a soigneusement rangé son uniforme militaire, souvenir de sa vie d’avant, lorsqu’il était aide-soignant dans l’armée. Pourtant, la première casquette de cet originaire de Sébastopol, dans une Crimée, aujourd’hui annexée par la Russie, était celle de kinésithérapeute pour enfants handicapés. Il n’a pu s’épanouir dans ce métier que deux petites années, jusqu’au 24 février 2022. Le jeune kiné se rue alors au centre de recrutement :
Il vous reste 34.4% de cet article à lire. La suite est réservée aux abonnés.