Un critique du temps passé disait de la , de Jean-Sébastien Bach, qu’elle était . Je partage cet avis. Notamment lorsqu’elle est dirigée par John Eliot Gardiner dans une version unanimement louée pour sa splendeur, sa perfection, ainsi que son énergie et sa puissance.
Je ne sais combien de fois je peux l’écouter en boucle, interprétée par l’English Baroque Soloists et le Monteverdi Choir. L’interminable fugue du me subjugue totalement ; elle me donne l’impression de vivre, en l’écoutant, un moment de grâce.
Depuis l’incident du 22 août 2023, mon appréhension de cette version a cependant évolué. Ce jour-là, Gardiner, fou de rage au motif qu’un chanteur ait quitté la scène du mauvais côté lors d’une représentation des de Berlioz, lui asséna une gifle ainsi qu’un coup de poing. Cet incident stupéfia chacun.
Tout, à mes yeux, était douceur et bienveillance chez cet homme (dont je ne connaissais ni le caractère ni la vie personnelle, à vrai dire). Son patronyme comme sa physionomie me laissaient entrevoir des paysages bucoliques harmonieux. A la manière de cet air célébrant l’amour dans , de Purcell : (« Que ces bosquets mélodieux et ces fraîches fontaines ombragées assistent au triomphe de l’amour et de la beauté »).
Brutalité intrinsèque
La beigne : adieu le jardin clos, l’luxuriant baigné d’harmonie. J’ai imaginé des musiciens terrifiés à l’idée de se planter, de faire une fausse note, de renverser leur pupitre, en proie à l’angoisse de contrarier Grosbaff, le chef. Un climat de tension s’est installé. Sans doute était-il de ma part totalement fantasmé. Gardiner n’a pas la réputation d’être un cogneur. On le décrit, au contraire, comme , .
Rien n’y faisait, pourtant. Etais-je condamnée à ne plus pouvoir écouter sa version de la comme au premier jour ? Sans doute. Mais était-ce si dramatique ?
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