En Géorgie, la colère s’étend aux régions : « On a jamais vu un gouvernement aussi traître ! »

Les deux premiers jours, il était tout seul à manifester dans la rue, avec sa pancarte. Des passants se sont approchés, intrigués, et l’ont photographié. Certains l’ont encouragé, surpris par son audace. D’autres l’ont traité de fou. Des enfants l’ont pris pour un mendiant et lui ont donné une pièce. Un homme à la carrure impressionnante a foncé droit vers lui. Le manifestant solitaire a pensé qu’il allait se faire massacrer, mais l’autre l’a pris dans les bras :

A Khachouri, petite ville paisible du centre de la Géorgie, Sergo Gambachidzé, psychologue de 39 ans, est le premier à avoir protesté contre l’annonce du gouvernement, le 28 novembre, de suspendre le processus d’adhésion à l’Union européenne (UE) jusqu’en 2028. raconte-t-il,, le parti au pouvoir.

Depuis, des centaines de personnes l’ont rejoint. Des manifestations se tiennent désormais chaque jour dans le square, au milieu des décorations de Noël. L’événement est si rare qu’il a fallu fouiller dans les archives pour savoir à quand remontaient les dernières protestations. C’était en mai 1989. À l’époque, des centaines de personnes s’étaient élevées contre la répression d’une manifestation antisoviétique. Depuis, l’URSS est tombée, la Géorgie est redevenue indépendante en 1991 – elle l’avait déjà été pendant trois ans, avant l’invasion soviétique, en 1921 – et s’est résolument tournée vers l’UE, un objectif inscrit dans la Constitution. Et voilà qu’aujourd’hui, le parti au pouvoir depuis 2012, Rêve géorgien – fondé par l’oligarque milliardaire Bidzina Ivanichvili, l’homme fort de ce pays de 3,7 millions d’habitants – enterre cette perspective, détournant le pays de l’Europe au profit de la Russie.

Dans cette ex-république du Caucase, où 80 % de la population est favorable à l’intégration européenne, ce revirement a soulevé une immense colère et un mouvement de protestation sans précédent, qui s’étend désormais à plus de 40 villes à travers le pays. Un groupe de marins géorgiens a même lancé une campagne de protestation en pleine mer, appelant à [leur] et à condamner la répression des manifestants.

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