Chanteurs, la tentation du symphonique

A ce rythme, aucun pupitre d’orchestre de France, de Navarre ou d’ailleurs ne risque de se retrouver au chômage technique. Alors que pop et variété n’en finissent plus de célébrer leur patrimoine avec une pléthore d’albums de reprises et de concerts hommages les transformant de plus en plus en musiques de répertoire, un exercice est aujourd’hui en vogue : l’adaptation de chansons en version « symphonique », offrant à leurs auteurs-interprètes l’occasion d’assouvir leurs rêves de grandeur – et peut-être d’affronter leurs complexes – auprès de musiciens issus du Conservatoire.

La chanson française a traditionnellement recouru à des cordes et à des bois en se liant à des arrangeurs et orchestrateurs rompus à l’écriture de partitions : François Rauber auprès de Jacques Brel, Paul Mauriat pour Charles Aznavour, Alain Goraguer avec Jean Ferrat ou Jean-Michel Defaye du côté de Léo Ferré… Ces collaborations ont périclité à partir des années 1980 avec le règne du synthétiseur, qui a permis de réduire drastiquement les budgets artistiques. En décembre 1989, Véronique Sanson allait toutefois à contre-courant en chantant ses succès entourée de l’Orchestre symphonique de Prague au Théâtre du Châtelet, à Paris. Expérience documentée par l’album . Le terme serait dès lors systématisé.

Les disparus et les vivants

A ce jeu, tout le monde est concerné : voix de stentor (Serge Lama avec en 1998 ou Florent Pagny pour en 2004) comme timbres plus fragiles (Miossec avec l’Orchestre lyrique régional Avignon-Provence en 2003 ou Jane Birkin avec l’album en 2017). Même les disparus. Le succès de l’album posthume en 2019 n’a pu qu’encourager de telles initiatives chez les décideurs de l’industrie du disque. Le chant de l’idole défunte deux ans plus tôt avait été isolé et accompagné d’une production symphonique de son directeur musical Yvan Cassar. Le procédé a été repris pour les 60 ans de la mort d’Edith Piaf (1915-1963) dans l’album , avec de nouveaux arrangements exécutés par des phalangistes britanniques, la chanteuse canadienne Isabelle Boulay s’emparant de son côté du répertoire de « la Môme » pour un . Les titres, comme on le voit, ne rivalisent pas d’originalité.

Bis repetita à l’occasion du centenaire de la naissance de Charles Aznavour : un a été présenté les 28 et 29 septembre à la Philharmonie de Paris avec un casting de chanteurs (Yael Naim, Zaz, Keren Ann ou Charlie Winston) et l’Orchestre Lamoureux. Pour le 8 novembre est annoncé un (Sony Classical), cette fois avec l’Orchestre national d’Avignon.

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