Il est plus de 3 heures du matin à Tbilissi, et comme chaque nuit depuis une semaine, la ville ne dort pas. Mercredi 4 décembre, les rues fourmillent de manifestants, enveloppés dans des drapeaux géorgiens et européens, lunettes de ski ou de natation sur les yeux, masque à gaz et casque de chantier pour les mieux équipés. Les sifflets se mêlent aux vuvuzelas et aux détonations des feux d’artifice, tirés en l’air par les protestataires ou sur les forces de l’ordre, déployées en masse aux abords du Parlement.
Les manifestants ont érigé des barricades, du jamais-vu depuis plus de trente ans dans la capitale géorgienne. La foule entonne l’un de ses cris de ralliement : Des cris, mêlés de joie et de colère, éclatent. (). Sur la chaussée, des groupes se réchauffent autour de feux improvisés. La police tente de disperser la foule avec des canons à eau et en usant de gaz lacrymogènes. Un blessé est évacué en hâte par des volontaires. Des doigts d’honneur sont adressés aux forces antiémeutes. Un groupe chante :
La ville est en effervescence depuis que le gouvernement a annoncé, le 28 novembre, la suspension du processus d’adhésion à l’Union européenne (UE) jusqu’en 2028. Les manifestants dénoncent aussi les résultats des élections législatives du 26 octobre, qui ont octroyé la victoire au parti au pouvoir, Rêve géorgien. Ni l’opposition ni la présidente, Salomé Zourabichvili, ne reconnaissent le scrutin, dénonçant des . Le mouvement de contestation s’est étendu à quarante-deux villes à travers le pays. Outre les manifestations, des centaines de fonctionnaires, des milliers de professeurs, des banques, des hôpitaux, et des prêtres ont condamné la décision du gouvernement.
A Tbilissi, Luka Patachouri, 27 ans, descend chaque soir dans la rue. enrage ce comédien de théâtre, qui s’est bricolé un bouclier avec un bidon d’acier. Une ambulance passe en trombe, près d’une poubelle incendiée. , assure-t-il. Trente ans plus tôt, c’est sa mère qui était dans la rue lors d’une manifestation antisoviétique, le 9 avril 1989. Elle soutient désormais son fils, à la différence de son père, un partisan de Rêve géorgien avec lequel Luka a rompu contact.
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