L’air est connu. Quand les politiques commencent à se mêler du travail des journalistes, la première réaction de ces derniers est toujours l’inquiétude. Les nuques se raidissent, les éditoriaux fleurissent, et chacun rappelle l’importance de la liberté d’expression et de l’indépendance des rédactions.
Les commentaires suscités par les déclarations d’Emmanuel Macron en faveur d’une labellisation des sites d’information dignes de confiance n’ont pas fait exception. Mais, cette fois, l’offensive principale est venue des médias du groupe Bolloré et de leur camp politique, qui ont instrumentalisé sans vergogne la défense de la liberté d’expression dans leur combat contre Reporters sans frontières (RSF). L’Elysée et le gouvernement ont dû allumer des contre-feux pour rappeler qu’à aucun moment il n’a été question d’un contrôle étatique de la qualité de l’information.
Ce réflexe de rejet n’est pas sans vertu : il rappelle que, dans une démocratie, ce n’est pas au pouvoir en place de dire aux journalistes comment ils doivent travailler. Comme l’a résumé l’historien des médias Alexis Lévrier, . Encore faut-il savoir de quoi on parle et ne pas se contenter de caricatures et de procès d’intention.
En France et ailleurs dans le monde, l’initiative la plus aboutie de labellisation – ou, plus précisément, de certification – est la Journalism Trust Initiative, portée par RSF. La certification ne vise pas à valider chaque contenu publié ou diffusé, ou à lui attribuer un score de fiabilité, mais elle concerne l’organisation et le fonctionnement des médias. Ils sont examinés par un auditeur externe, chargé de s’assurer du respect des bonnes pratiques.
L’idée d’une certification, pratique banale dans beaucoup d’entreprises, suscite des réticences légitimes. Puisque l’information n’est pas un produit comme un autre, il n’y aurait rien à attendre des normes, des « contrôles qualité » ou des audits. Mais, à toujours mettre en avant cet argument, on risque de se complaire dans une forme d’« exceptionnalisme » synonyme d’immobilisme. La labellisation est l’occasion de ressortir les chartes de déontologie des étagères et de réfléchir à la meilleure façon de produire une information de qualité. Ce n’est jamais inutile.
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