La règle était tacite mais bien respectée. Depuis que son mari, Dmytro, avait rejoint l’armée, Tetyana et lui devaient s’envoyer un message par jour. A l’automne 2024, cet Ukrainien de 39 ans combattait dans les environs de la petite ville de Kourakhove, dans l’est du pays, cible d’une offensive russe massive. Un jour, il a cessé de répondre. C’était le 5 novembre 2024. La veille, [ils][en][eux], se souvient Tetyana, dimanche 25 mai, lunettes fumées pour cacher ses yeux rougis, les épaules recouvertes d’un drapeau ukrainien.
Des soldats de sa brigade lui ont annoncé, quelques jours plus tard, que Dmytro était porté disparu à la suite d’un assaut ennemi. Son corps n’a jamais été retrouvé. Kourakhove est aujourd’hui une ville occupée.
Depuis, Tetyana vit dans cet entre-deux – entre sentiment de perte et impossibilité de faire son deuil tant qu’il existe une once d’espoir, tant qu’un corps n’a pas été retrouvé. Fonctionnaire dans une caisse de retraite, elle attent un signe de vie, scrutant jour et nuit les vidéos de propagande russe montrant des soldats ukrainiens capturés, dans l’espoir de reconnaître le visage de son époux. Elle ne fréquente plus que des femmes partageant le même destin, dans sa ville d’origine de la région centrale de Khmelnytsky.
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